Déjà à l'époque du cuivre, l'opérateur historique, ex-France-Telecom, avait bénéficié de sa situation de monopole sur l’ADSL. La mise en place du dégroupage avait permis aux autres opérateurs de proposer des offres xDSL sur l'ensemble du territoire, afin de rétablir une concurrence plus loyale.
Pour la fibre, si la situation est légèrement différente, au bout du compte, la situation est quasi similaire, en particulier pour les TPE/PME. Pour le particulier, des accords de co-investissement permettent aux opérateurs de venir sur les réseaux fibre FTTH déployés par d'autres.
Cependant, sur le secteur de la fibre pour les pros (FTTE), cette ouverture n'existe que sur les RIP, et très rarement sur les zones plus denses.
Une situation dangereuse pour le déploiement du THD en France pour les entreprises, dénoncé aussi dans un récent rapport de la Cour des Comptes. Les petits opérateurs ne peuvent rivaliser face aux offres business d’Orange et dans une moindre mesure celles de SFR. Difficile pour ces opérateurs en effet de pouvoir proposer des offres cohérentes et compétitives au niveau national, notamment pour des sociétés multi-sites (sur plusieurs départements/villes).
Une consultation publique de l'ARCEP en cours
L'ARCEP a lancé une consultation publique sur la fourniture en gros d'accès local, central et/ou de haute qualité sur le marché du haut et très haut débit fixe. Il y est question en particulier de la Boucle Locale Optique Mutualisée (BLOM), amenée à remplacer la boucle locale cuivre (ou Boucle Locale Optique Dédiée - BLOD).
Il s'agira aussi de mettre en place un statut « zones fibrées », avec une augmentation progressive du tarif du dégroupage cuivre, afin d'inciter à une migration plus rapide vers la fibre.
Une demande a été faite par la FIRIP à l'ARCEP pour imposer à l'opérateur dominant du marché fibre pour les entreprises (Orange), des offres de gros en mode passif et activé (de type FttH Pro et FttE). Cela sur l'intégralité des réseaux déployés, par Orange ou d'autres...
Alternative Télécom pour une offre fibre activée mutualisée
Comme l'ARCEP, la FIRIP et les autres opérateurs des télécoms, Alternative Télécom vient aussi de publier un manifeste pour une offre d’accès activée sur la Boucle Locale Optique Mutualisée. L'objectif est de permettre l’émulation de la concurrence et de l’innovation sur le marché du Très Haut Débit, au profit de la compétitivité des entreprises.
Alternative Télécom (anciennement Alternative Mobile), est une association qui compte désormais 11 membres. Elle représente plus de 2000 emplois et plus de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires.
Les membres des Collèges Fixe et Mobile d'Alternative Telecom sont : Adista, Afone, Alphalink, Coriolis Télécom, Euro-Information Télécom, La Poste, Nerim, Paritel, Prixtel, SCT Télécom, Transatel
Une situation de monopole d'Orange... et de SFR
Orange a déployé 70% des prises fibre pour les pros raccordables en France. SFR représente 20% du marché fibre Pro et Bouygues Telecom 5%.
Sans offres de gros permettant aux petits opérateurs de venir sur ces réseaux fibrés en ZTD et ZMD, on est bien loin de la configuration de libre concurrence des RIP. Sur ces derniers, on trouve des réseaux neutres, ouverts et le plus souvent activés. Ainsi, sur ces Réseaux d’Initiative Publique, 91% d'entre eux accueillent plus de 5 opérateurs actifs sur le marché des entreprises, permettant une concurrence qui est bénéfique pour faire baisser les prix des offres. Comme le fait remarqué l'ARCEP, les entreprises sont, en proportion, deux fois moins raccordées en fibre optique que la clientèle résidentielle (7% de l’ensemble des accès souscrits par les entreprises contre 16% chez les particulier à fin 2016).
Le gouvernement souffle le chaud et le froid
Sur le sujet de la dynamique concurrentielle qui peine à se développer sur ces réseaux fibrés destinés aux entreprises, le Gouvernement joue aussi un double-jeu.
Actionnaire à hauteur de 23% d'Orange, cible de presque toutes les critiques, il doit également veiller en théorie à une concurrence loyale et au développement de l'accès au numérique pour tous.
Deux positions antinomiques difficiles à tenir, qui font dire à de nombreux intervenants que deux axes majeurs sont à étudier.
- il faudrait idéalement que l'état sorte du capital d'Orange. Une proposition abordée par plusieurs candidats à l'élection présidentielle.
- il faudrait séparer chez orange la partie Réseau/Infrastructure et la partie Offres/Opérateurs télécoms.
L'ARCEP, la FIRIP, l'Agence du Numérique... tous unanimes
Pris à partie par l'ensemble des acteurs, Orange se défend bec-et-ongles, mettant en avant ses investissements massifs qui lui permettent d’être actuellement dans une situation favorable. L’opérateur n’entend donc pas favoriser outre-mesure l’arrivée de concurrents sur ses réseaux qui profiteraient alors de ses investissements.
Aura-t-on un début de réponse ce jeudi 20 avril durant le Show Hello d’Orange ?
A noter par ailleurs, une nouvelle initiative qui vient d’être lancée avec l’Association des Opérateurs Télécoms Alternatifs (AOTA). Elle regroupe déjà 22 membres, des opérateurs télécoms alternatifs, qui veulent eux aussi faire entendre leur voix. S’ils ne représentent que 450 salariés et un CA de 70 M€, ils comptent bien venir peser sur le sujet, à l’instar de la FIRIP ou d’Alternative Telecom.
On trouve dans l’AOTA : Adenis, Add On, Alsatis, ASC, C'Pro, Ergatel, Eurafibre, FUllSave, Hexatel, Izzycom, K-Net, moji, Pacwan, Netalis, Neuronnexion, Quantic Telecom, RIPTec, Timebox-Prod… et la Fédération FDN.