Observatoire sur la qualité des réseaux en fibre optique : à peine publié et déjà critiqué
En publiant son observatoire sur la qualité des réseaux en fibre optique, l'Arcep, le régulateur des télécoms pensait avoir trouvé un remède au problème qui mine la montée en puissance de la fibre optique en France. En effet, pas une semaine ne se passe sans qu'un citoyen ou élu ne se plaigne d'un débranchement sauvage, d'un câblage anarchique ou d'une armoire technique dégradée, provoquant des pannes ou des échecs au raccordement. Une situation problématique qui, selon Laure de la raudière, la présidente de l'Arcep, peut avoir un lien de cause à effet avec la « légère baisse du nombre de nouveaux abonnements à la fibre » enregistrée en 2022 par rapport à 2021 (3,6 millions contre 4 millions).
Consciente que la fibre optique peut parfois avoir mauvaisse presse, elle a décidé de publier un observatoire sur la qualité des réseaux en fibre optique, dont les premiers résultats ont été publiés vendredi, et qui est amené à devenir trimestriel. Dans cet observatoire, l'Arcep dresse la liste des zones moyennement denses et des Réseaux d'Initiative publique dans lesquelles le déploiement de la fibre optique pose problème. Quant aux opérateurs d'infrastructures qui ont déployé lesdits réseaux, ils sont cités nommément.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette manière de faire a fortement déplu à l'AVICCA (association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'Audiovisuel). Dans un article publié sur son site internet dans la foulée de l'observatoire, elle tire à boulets rouges sur l'Arcep : "Loin d'apaiser un contexte déjà explosif, l'Autorité joue avec le feu et arrive à l'effet contraire, ce qui n'est pas sans susciter nombre d'agacements", pointe l'AVICCA en préambule.
Avant de sortir la sulfateuse : "Imaginez des casseurs qui brûlent régulièrement des dizaines de véhicules. Imaginez la gendarmerie qui, plutôt que de chercher à identifier les casseurs et leurs motivations, s'intéresserait en priorité à la solidité des voitures et à leur résistance au feu. Imaginez les enquêteurs qui demanderaient leur avis aux seuls casseurs plutôt qu'aux victimes. Imaginez un rapport de police qui, in fine, conduirait à pointer du doigt les marques et modèles d'automobiles jugées trop fragiles aux coups et trop sensibles au feu et les élus des villes où interviennent ces dégradations en "trop" grand nombre. Imaginez un rapport d'enquête qui s'arrêterait à ce seul constat et demanderait aux seuls constructeurs automobiles et élus de rendre des comptes. C'est peu ou prou ce que vient de faire le gendarme des télécoms, l'Arcep, s'agissant des dégradations constatées depuis 2017 sur la quasi-totalité des réseaux de fibre optique en France".
Que reproche exactement l'AVICCA à l'Arcep ?
"En s'intéressant aux seuls réseaux les plus dégradés (...), le Régulateur dédouane et conforte les 4 opérateurs commerciaux dans leur approche entêtée des raccordements FttH", dénonce l'AVICCA. L'association ne nie que certains réseaux en fibre optique sont mal construits. Mais, selon elle, "ce n'est pas parce que les réseaux sont de mauvaise qualité qu'ils sont dégradés. Ils sont dégradés parce que des techniciens non formés interviennent et, comme ils y rencontrent plus de difficultés qu'ailleurs du fait de leur mauvaise construction, les saccagent encore plus rapidement".
Donc, si il y a des pannes et des échecs au raccordement, ce n'est pas uniquement de la faute des opérateurs d'Infrastructrures, mais aussi de celle des opérateurs commerciaux qui confient souvent le raccordement final à la fibre optique à des sous-traitants. En outre, estime l'AVICCA, "Les réseaux -mêmes les mieux construits- sont tout autant dégradés par les 4 opérateurs commerciaux qui recourent au mode STOC. Simplement, ces réseaux étant plus robustes, ils résistent mieux aux assauts des techniciens sous qualifiés de ces opérateurs". En clair, à en croire l'AVICCA, pour redorer le blason de la fibre il faut autant reprendre les réseaux dégradés que revoir le mode STOC (sous-traitance opérateur commercial) mis en oeuvre par les 4 OCEN (opérateur commercial d'envergure national).
Alors, peut-être que l'Arcep a voulu bien faire, mais elle est passée à côté de son objectif "en se contentant des seules remontées d'informations des opérateurs commerciaux qui sont ceux-là mêmes qui dégradent la plupart des réseaux en mettant en oeuvre les raccordements à la fibre optique en mode STOC".