Lors du rachat de PT Portugal pour 7,4 milliards d’euros en 2014-2015, Altice a-t-il voulu aller trop vite ? Oui, estime la Commission européenne, qui estime que le groupe n’a pas attendu d’avoir son feu vert pour enclencher l’acquisition de l’opérateur portugais. Pour Bruxelles, Altice a ainsi commencé à exercer une influence sur le processus décisionnel de PT Portugal, voire à prendre certaines décisions, sans respecter les procédures de l’UE. Avant d’avoir obtenu l’aval de la Commission, et même avant de lui avoir notifié son projet, le groupe était déjà partiellement à la manœuvre de l’entité qu’elle envisageait d’acquérir, selon l’exécutif européen.
« Pour le moins négligente », poursuit la Commission, Altice se voit ainsi infliger une amende de 124,5 millions d'euros. Un montant qui « traduit la gravité de l'infraction et devrait dissuader les autres entreprises d'enfreindre les règles de l'UE en matière de contrôle des concentrations », a commenté la commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager.
Cette méthode consistant à devancer le signal de départ (« gun jumping ») rappelle furieusement celle constatée en 2016 par l’Autorité de la Concurrence à l’occasion du rachat de SFR et Virgin Mobile par Numericable. Une opération elle aussi sanctionnée à hauteur de 80 millions d’euros.
Altice contre-attaque
Toute ressemblance avec des faits ayant déjà existé serait purement fortuite, argumente pour sa part Altice : alors que sur le dossier français, le groupe avait fait amende honorable, il conteste ici l’analyse de la Commission, et annonce son pourvoi en appel. Sur le fond, l’entreprise de télécoms estime en effet avoir exercé un droit de consultation légitime au regard des pratiques habituelles en matière de fusions-acquisitions, et dément avoir influencé le processus décisionnel de PT Portugal en amont du feu vert de la Commission. Sur la forme, Altice reproche en outre à la Commission d’avoir porté atteinte à ses droits, notamment lors de l’enquête.